Je ne résiste pas à partager avec vous cet extrait de MEMOIRE D’ACTEUR, biographie de Michel Bouquet (par Fabienne Pascaud, éd. Plon). De quoi nous rappeler que l'école d'autrefois n'était pas non plus la panacée, même si on peut assurément parler ici d'un témoignage personnel... La nostalgie n'est jamais une bonne chose : elle a tendance à n'éclairer que les aspects positifs du passé, les enjolivant à l'envie. Au risque d'oublier les coins d'ombre...
"Le piquet. Dans le meilleur des cas, l’élève est au fond de la classe, debout, tête baissée, mains dans le dos. Quand le maître veut être méchant, il lui fait porter, en plus, une grosse bassine d’eau, bras tendus, pendant cinq minutes ; succèdent dix minutes de repos ; puis cinq minutes de bassine d’eau à nouveau : et ainsi de suite, tant que l’élève paresseux ou insolent l’aura mérité…
Michel Bouquet ne se souvient de sa scolarité que comme d’un immense et interminable, et absurde piquet. On imagine que la silhouette même de ce garçon brun, maigrichon, taciturne, au visage impassible, à l’apparence constamment passive, devait encore davantage exaspérer ses maîtres que ses devoirs médiocres. D’ailleurs à longueur de temps puni, debout, les mains dans le dos et la tête baissée, il ne pouvait forcément étudier aucune leçon, ni réussir aucun exercice. La boucle était bouclée : de nouvelles sanctions venaient encore et toujours réprimer la mauvaise qualité du travail. Selon un enchaînement kafkaïen que rien n’aurait su briser.
Michel Bouquet ne se souvient de sa scolarité que comme d’un immense et interminable, et absurde piquet. On imagine que la silhouette même de ce garçon brun, maigrichon, taciturne, au visage impassible, à l’apparence constamment passive, devait encore davantage exaspérer ses maîtres que ses devoirs médiocres. D’ailleurs à longueur de temps puni, debout, les mains dans le dos et la tête baissée, il ne pouvait forcément étudier aucune leçon, ni réussir aucun exercice. La boucle était bouclée : de nouvelles sanctions venaient encore et toujours réprimer la mauvaise qualité du travail. Selon un enchaînement kafkaïen que rien n’aurait su briser.
À peine entré en classe, tôt le matin, le jeune Michel avait déjà depuis la veille plusieurs piquets de retard. Ce qui l’entraînait parfois très loin dans la nuit, où il devait rester éveillé debout au pied de son lit, jusqu’à 22, 23 heures le plus souvent, tandis que tout le monde dormait autour de lui : son frère Serge, par exemple, le lit à côté du sien, ce bon élève qui jamais n’était puni. Mais Michel ne se plaignait pas, il paraissait se moquer au contraire de ces calamités constamment renouvelées. Il était fier. C’était bien aussi ce qu’on lui reprochait… Le piquet, après tout, était juste un peu fatiguant pour le dos, les reins. L’élève récalcitrant aura passé finalement sa scolarité debout. Sept ans, quasiment debout."
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