"Mais ! Mais ???
MAIS OU SONT MES SABLÉS ???
C'EST PAS POSSIBLE ! J'AVAIS MIS UN MOT DESSUS !"
Vendredi matin.
J'arrive dans la salle des maîtres / cuisine / salle-à-manger commune et, sur la table, je vois immédiatement la grille sur laquelle j'ai mis les sablés des CP à refroidir, la vieille au soir, déserte.
Seuls un ou deux rescapés attestent qu'il y avait là, peu de temps auparavant, une vingtaine de biscuits dorés et croquant à souhait.
Et sous la grille, j'extrais pour preuve le fameux message de mise en garde :
"Sablés des CP ! Ne pas manger !", assorti d'une tête-de-mort pour faire bonne mesure...
L'enseignante ASH qui est là avec moi n'en revient pas : "c'est dég*eulasse !"
Qui a pu passer outre à cet avertissement et manger sans vergogne le fruit du travail des enfants ?
Un quiproquo peut-être ?
Quelqu'un aurait poussé le message, quelqu'un d'autre succombé à la tentation, ignorant la provenance des sablés ?
En tous cas, je suis atterrée : J'ai mis tant de coeur à réaliser ces humbles pâtisseries avec mes élèves...
Et c'était une première, pour moi : une sorte de baptême du feu !
J'avais réfléchi longuement à une bonne idée de réalisation, à vendre au marché de Noël de l'école.
Quelque chose de pas trop difficile, qui permette des apprentissages (lire la recette, repérer le type de texte, sa structure, acquérir du vocabulaire...).
J'avais trouvé la recette adaptée à des CP, avec des mesures simples (en "cuillères à soupe" ou "cuillères à café").
J'avais pris le temps de cuisiner d'appeler Mamoitié pour lui demander comment procéder intelligemment, comment éviter les bourdes des débutantes.
J'avais pris soin d'appeler Our-best-english-teacher-in-the-word pour lui demander de prendre ma demi-classe une heure entière, ces deux jeudis, afin que je puisse gérer convenablement l'autre moitié des élèves à la fabrication des sablés.
J'avais appelé mes copines pour qu'elles visitent leurs tiroirs et me trouvent les emporte-pièces de Noël qui vont bien.
J'avais fait les courses et m'étais assurée d'avoir tout ce qu'il faut : oeufs, beurre, farine, sucre, cannelle...
J'avais rassemblé le matériel, les cuillères, les rouleaux, les bols...
J'avais failli pleurer quand, le jeudi matin, en déchargeant du porte-bagage de mon vélo les ingrédients, je m'étais aperçu que j'avais oublié les fameux emporte-pièces à la maison. Ouf que MacopinedeGS en avait (vaches, dinosaures...mais aussi coeurs, carrés et ronds : ça fera l'affaire !!!).
Enfin, j'avais mené ma séance à bien, dans les temps, et le résultat avait l'air assez satisfaisant : des petits sablés tout-à-fait appétissants, que j'avais même réussi à ne pas faire brûler...
...
ET j'avais pensé à mettre un mot sur la grille pour avertir du caractère sacré des biscuits !
Dans cette école où de nombreuses gourmandes personnes passent, personnel de jour, de nuit, surveillantes, enseignantes... j'avais trouvé que c'était plus prudent !
...
...
...
Peine perdue.
Comme l'avait dit l'enseignante ASH, "c'est dég*eulasse !"
En fait, je n'ai pas eu le temps d'exploser, ni même de me liquéfier totalement : à peine la découverte faite, Madirlo a surgi comme un diable de sa boîte et m'a dit, un sourire d'une oreille jusqu'à l'autre :
"C'EST UNE BLAGUE !!!" Exhibant ma fournée de sablés, planquée dans une caissette métallique en haut d'une étagère !
AAAAHHHHH !
Soulagement et fureur amusée !
Pour une fois que c'est moi qui suis la victime d'une blague, il s'agit de faire bonne figure !
:o)
La vengeance est un plat qui se mange froid...
Elles étaient trois complices.
Je pardonne... mais je n'oublie pas !