Ami Lecteur, je ne résiste pas à partager avec toi une partie du mail que m'a envoyé il y a peu une de mes ex-moitiés professionnelles. Elle survis enseigne en Petite Section de maternelle.
C'est un exploit en soi.
Si tu penses encore que, plus les enfants sont petits, et plus le boulot d'enseignant est facile, détrompe toi vite ou passe ton chemin : la PS, c'est la classe la plus complexe, la plus fatigante et la plus exigeante qui soit !
Seulement, ce que tu ignores encore, c'est qu'en plus des trente élèves bavouillant-crachouillant-reniflant-pissotant-pleurnichant à qui tu dois apprendre le b-a-ba de la vie en société, tu peux avoir une ATSEM (Agent Territorial Spécialisé des écoles Maternelles), appelée plus communément aide-maternelle. Quand elle est sympathique et efficace, c'est un vrai plaisir... Mais ça n'est pas toujours le cas...
Ami Lecteur, je te laisse juge : tu as le droit de rire, mais pas trop fort. Prends plutôt le temps de t'apitoyer, de compatir et de réconforter ma côpine, s'il-te-plait : malgré son humour inaltérable, elle en a bien besoin !
Récit :
Je suis juste abattue ce soir par mon aide-maternelle remplaçante qui devait, pour m’avancer, coller un dinosaure sur une feuille et ce en 30 exemplaires…
Jusque là, tu suis…
Sachant que ce même dinosaure, je l’ai moi-même découpé 150 fois et collé 150 fois et que je n’en peux plus de ce POP (c’est son nom à cet abruti de diplodocus…).
Bref, je me penche sur mon ATSEM, lui murmurant :
« Tu voudrais pas m’aideeeeeeeer….?
- Oui, répond-elle dans un soupir, je ferai ce que je peux !!! (puis elle marque un temps de pause qui veut dire « tu m’em*erdes à te grouiller avant les vacances, moi j’ai envie de me reposer pour être fraîche dans 10 jours, y’a pas le feu au lac tout de même !!! »).
Là, tu imagines trente petits grouillant autour de toi, qui te pressent pour aller à la danse que tu as oubliée, prêts à te renverser, à te piétiner pour foncer dans cette p*** de salle, que j’appelle dans mes grands jours avec mon air niais : « salle mystère ».
Pause tu respires j’ai pas fini de t’expliquer
« Tesphanie, on y va dans la salle mytèle »
(Je te rappelle que nous sommes en Petite Section, donc les mots de plus de deux syllabes n’existent pas, les « r » sont bouffés, et les postillons gratos !!).
... Et l’autre, assise sur sa chaise, comme un flan, me voit m’exciter pour
30 POP !!!
Je descends donc dans cette salle mystèrrrrre en trombe, car attendue par l’intervenante que nous payons bonbon … je passe ce chapitre d’école riche… j’arrive dans la salle, promettant virtuellement une bonne torgnole à celui qui ne participerait pas à la danse que « vos gentils parents ont payée » et de gros bonbons à ceux qui feront tout bien… eheheh on ne se refait pas !...
Et me voilà partie pour 45 minutes à faire la danse du villageois, puis à gambader dans la forêt que personne ne voit sauf la prof de danse, croquer les noisettes sans casse-noix… et pensant fortement à mon pop qui est quand même un album que je fabrique avec les nenfants et ce depuis le début de l’année.
PRESSION.
J’essuie dans le même élan un pipi, une colère monstrueuse (pas du même enfant , ouf !) et voilà que je remonte en classe, même pas 4 à 4 car trente mouflets me suivent… donc 1 à 1 en tenant la rampe !
« Non Ferdinand tu n’as pas tenu la rampe, tu recommences… »
Fébrile, j’ouvre la porte de la classe, car pendant ma danse, mon ATSEM reste toujours en classe pour m’avancer !!!
...
...
Les 30 pop étaient collés.
Mais…
mais…
mais…
mais…
snif !...
C’était pourtant pas compliqué… tu prends une feuille canson blanche (a), tu prends un pop (b), tu prends de la colle (c), et tu fais (b) sur (a) avec (c)… ça paraissait bien comme logique…pas difficile…
Eh bien NON ! Elle a pris (a) ; elle a badigeonné de colle toute la feuille, intégralement ; elle a pris(b); elle l'a collé sur (a) et a empilé… snif… feuille suivante !
Bref, mes 30 pop se sont retrouvés façon pyramide, mariés pour le meilleur et pour le pire, ad vitam, collés, sans aucune possibilité de retour arrière…
Sachant que ces 30 pop avaient déjà fait l’objet d’un travail magistral auprès des enfants et que ce collage était une façon de mettre en lumière ce travail remarquable dans notre album...
Sachant qu’il s’agissait d’un dernier travail à accomplir.
Sachant qu’elle m’a glissé à ce moment « J’espère que c’est ça que tu voulais !!! »
Alors, tu comprendras pourquoi je suis abattue, atterrée… et que la seule pensée qui résonne dans mon cerveau vide soit « je la tue où, quand, comment, avec quelle arme ? »
Ça serait bien si elle se faisait bouffer par un pop !!!